Législatives anticipées : pauvre France, pauvre Europe, pauvre planète

Bien que l'écologie ne suscite globalement qu'un faible intérêt pour une grande majorité de nos partis politiques, l'accession au pouvoir de l'extrême droite à la tête de la République française est assurément le scénario le plus catastrophique, autant pour les humains, que pour le climat et la biodiversité. Photo : Pixabay
Bien que l'écologie ne suscite pas l'intérêt mérité pour une grande majorité de nos partis politiques, l'accession au pouvoir de l'extrême droite à la tête de la République française est assurément le scénario le plus catastrophique, autant pour les humains, que pour le climat et la biodiversité.

Nous voilà donc avec un Rassemblement national plus proche du pouvoir qu’il ne l’a jamais été dans l’Histoire de la Ve République. J’entends autour de moi des gens s’indigner, paniquer, se poser la question du « Comment en est-on arrivé là ? ». Celle que l’on se pose, en somme, à chaque scrutin électoral, qu’il soit municipal, présidentiel ou européen, depuis 2002 et le fameux second tour qui opposait alors Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen à la présidence française.

A l’époque, j’étais étudiante Erasmus à l’Ecole de journalisme de Marseille et je me souviens des réactions d’effroi, des interviews et des débats politiques qui ont suivi, chaque parti récupérant la même phrase, scandée depuis, elle aussi, à chaque déroute électorale « Nous avons entendu les Français. Nous allons nous remettre en question et nous unir pour faire front contre l’extrême droite. »  

Comme probablement des milliers d’électeurs, je me suis mise à voter non plus pour, mais bien contre. Y compris pour cette élection européenne du 9 juin 2024, comme bien des Français qui se sont déplacés jusqu’aux urnes…

Nos politiques entendent-ils vraiment la colère et le désenchantement des Français ? La question mérite d’être posée. Comme celle du traitement médiatique accordé à cette campagne européenne, où le nom de Jordan Bardella a été cité 17 309 fois, soit 5 477 fois de plus que Raphaël Glucksmann. Approximativement 11 500 fois plus que Marion Maréchal, François-Xavier Bellamy, Valérie Hayer et Manon Aubry. Et près de 12 500 fois plus que Marie-Toussaint ou Léon Deffontaine. 

Un malaise médiatique qui s’accentue d’autant plus quand on revient sur le débat Gabriel Attal- Joan Bardella du 23 mai sur France 2, dont on se demande encore la réelle vocation, organisé en pleine campagne pour les européennes, et non pour la présidentielle française. Quoi de mieux que de placer le candidat président du RN au même niveau que le Premier ministre pour le hisser à la fonction présidentiable ? Bravo le service public. 

Et que dire du débat du 21 mai sur LCI, où sous la « directive » de David Pujadas, Jordan Bardella s’est vu exempté de s’exprimer sur son programme en matière d’énergie (abordé dans le cadre de 20 minutes dédié à un volet écologique pour une émission qui a duré près de trois heures), puisque « en avance sur son temps de parole ». Un candidat RN rassuré toutefois par le journaliste sur le fait qu’il pourrait « se rattraper sur la thématique suivante, l’immigration, un thème qui vous est cher ». 

Un thème effectivement chéri par le RN et que l’on ne connaît que trop bien. On aurait préféré l’entendre sur son programme d’ « écologie raisonnable », qui au-delà d’être truffé de contradictions, s’apparente surtout à une sérieuse marche arrière pour la transition écologique et énergétique en Europe, comme en France. 

Je pourrais encore vous parler du plateau du 27 mai de BFM, où l’urgence écologique a été présentée et abordée sous le titre « L’Europe est-elle trop verte ? », ramenant pour l’essentiel les enjeux écologiques européens à la question de la voiture électrique…

Alors oui, les Français peuvent être dépités par le score obtenu par le candidat du Rassemblement national lors de ce scrutin européen. Affolés de constater la montée en puissance de l’extrême droite un peu partout en Europe. Une grande majorité d’entre eux se rendra une nouvelle fois aux urnes les 30 juin et 7 juillet prochains, à l’appel d’Emmanuel Macron, pour sauver, une nouvelle fois aussi, la France de l’arrivée au pouvoir de cette extrême droite dans le cadre d’élections législatives anticipées. 

Ou peut-être pas. Certains décidant visiblement, à en croire les témoignages glanés depuis samedi soir, de boycotter ces élections, estimant que « nos dirigeants n’auront qu’à apprendre à diriger avec un premier ministre RN, ils l’auront bien cherché ». Un cas qui pourrait s’apparenter, pour d’autres, à une stratégie macroniste pour désavouer le parti extrémiste quant à sa capacité à diriger le pays. 

Au-delà des spéculations, une certitude s’impose : aux côtés de notre pauvre France et de notre pauvre Europe, s’érige aussi une pauvre planète, qui suscite un tout aussi pauvre intérêt pour l’écologie de la part d’une grande majorité de nos partis politiques.

Sur les 38 listes déposées en France dans le cadre de ces élections européens8 seulement ont présenté une ou des mesures pour les océans. Ces étendues d’eau qui se réchauffent comme jamais, qui couvrent quelque 70,8 % de la surface du globe, et à qui l’on doit une bouffée d’oxygène sur deux de l’air que nous respirons, comme la capture de près de 30% de nos gaz à effet de serre.

L’Europe ne sera jamais trop verte, pas plus que la planète. A l’heure où les alliances s’organisent de part et d’autre en vue de ces législatives anticipées, espérons que nos partis en prennent davantage conscience. Et qu’en dépit du désamour portés par les Français à l’égard de nos politiques, la conscience que l’accession au pouvoir de l’extrême droite à la tête de la République, scénario qui est assurément le plus catastrophique, autant pour les humains, que pour le climat et la biodiversité, l’emporte sur la colère populaire. Réponse le 7 juillet.

Pour visionner le débat spécial transitions avec les candidats locaux aux Européennes, organisé par la Cité des transitions à Marseille et coanimé par Maintenant, c’est par ici.

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